À mon tour !
Mathias Damour, pseudo Astirmays, 42 ans
Je contribue à Wikipédia depuis début 2006, j'ai ouvert Vikidia fin
2006, et j'ai adhéré à Wikimédia France à partir de 2007.
Voyez ma page utilisateur sur Vikidia :
https://fr.vikidia.org/wiki/Utilisateur:Astirmays , avec quelques
sous-pages qui me tiennent lieu de blog.
Il m'est arrivé de présenter Vikidia par une généalogie (sommaire) que
je lui prête, je peux difficilement faire un dessin par courriel, mais
voilà :
- Le genre ou modèle encyclopédique + le mode de production les idées et
valeurs du logiciel libre seraient les parents de Wikipédia
- le modèle, l'exemple de Wikipédia + les mouvements de l'éducation
nouvelle, les pédagogies actives ont permis, inspiré voire engendré Vikidia.
Pour le dire autrement, Vikidia est très largement calqué sur Wikipédia
(fonctionnement, objectifs, avec la différence de la tranche d'âge
visée) ce qui fait qu'il y avait peut de choses à inventer, instaurer ex
nihilo de ce point de vue, mais l'apport des pédagogues (les Freinet,
Korczak...) permettait de concevoir que c'était possible, transposable
pour et avec des enfants.
Maintenant à propos du mouvement Wikimedia et de Wikimédia France, j'ai
suivi WMFr à peu près comme un simple membre, et je suis également
inscrit depuis longtemps - avec quelques interruptions - sur la liste de
discussion principale de Wikimedia (internationale, donc).
J'étais particulièrement remonté contre la politique de la directrice de
la WMF Sue Gardner, sans doute en particulier vers 2011 - 2013. Voici ce
que je peux en dire, ce que j'en ai perçu et dont je me souviens (c'est
forcément subjectif). Par un travail progressif,sucrés, elle
À cette époque, Sue Gardner, (suivant ses propres idées à moins que ce
soit sur consignes, ou une sorte de consensus à la WMF, je ne sais pas
bien) a fortement centralisé le mouvement Wikimédia, en particulier en
reprenant pas à pas une grande part de l'autonomie financière des chapters
Cela s'est fait en s'appuyant sur divers mots d'ordres, des annonces
souvent entourées de messages mielleux et quelques manœuvres. C'était
notamment l'affirmation que l'argent collecté était celui du mouvement
(donc un chapter ne devait pas avoir de droits particuliers sur l'argent
collecté dans le pays où il représentait le mouvement. Ça a été son
texte guide « narowing focus » apparemment un vocabulaire d'entreprise
en difficulté qui doit se réformer et se recentrer sur son cœur de
métier, qui me semble décalé pour une fondation en plein développement,
dont les recettes augmentaient alors dans des proportions
impressionnantes, et pour un mouvement réparti sur plusieurs pays. Et
puis il y a du avoir des épisodes sur la responsabilité, c'est-à-dire
qu'un soucis dans un chapter pouvait avoir des conséquences pour tout le
mouvement, et que la fondation avait donc le devoir de tenir étroitement
les chapters, qui en même temps étaient selon elle une charge quand il
fallait répondre rapidement à telle ou telle crise qu'ils pouvaient
connaître.
C'est là que s'est mise en place la mécanique de répartition des fonds.
Je me souviens d'un épisode, où dans un premier temps, il devait avoir
été annoncé que la WMF elle-même passerait par le même processus que les
chapters pour justifier de son utilisation de l'argent du mouvement, à
l'exception des missions de cœur ("core"). Puis j'avais vu un texte de
sa part où elle tortillait pour dire qu'en fait il valait mieux
comprendre ces missions "cœur" au sens large, ce qui revenait en fin de
compte à ce que la WMF s'exonérait de long dossiers et examens pour
justifier ses dépenses et son développement rapide, tandis qu'elle
imposait tout cela aux chapters.
Elle a redéfini les groupes affiliés en divers niveaux, avec des groupes
thématiques faisant que les chapters présent dans un pays donné étaient
encore un peu marginalisés.
Je me souviens (et j'ai retrouvé cette fois-ci) une phrase révélatrice -
plus ou moins en creux - de sa mainmise sur la politique de la WMF, que
l'on trouve dans le compte-rendu du "Finance Meeting" de février 2012,
fait par Christophe Henner, qui était déjà bien impliqué dans les
affaires internationales de Wikimédia :
« /Sue est toujours égale à elle-même... mais pas là. Pour la première
fois en 5 ans elle était effacée, discrète. Sa position ne bougera pas,
mais je pense qu'elle n'est absolument pas sereine quant à son adoption
par les trustees. C'était la première fois qu'elle n'était pas au cœur
des discussions, mais que c'était le board. C'est un revirement
significatif où il semblerait que le board reprenne un semblant de
pouvoir./ »
https://membres.wikimedia.fr/Finance_Meeting_2012/CR_Christophe
Ensuite, une chose qui m'a semblé anormale et également révélatrice est
le fait que Sue Gardner ait annoncé elle-même son départ, puis qu'elle
n'a quitté son poste qu'environ 1an 1/2 plus tard (plus récemment on a
eu des éléments sur les conditions financières de son départ, que je ne
connais pas bien mais qui ont suscité la polémique).
Il y eu quelques messages justifiant ce délai par la difficulté de
trouver la bonne personne pour remplacer cette directrice (un
recrutement a été interrompu je crois). Puis Lila Tretikov a été
embauchée. Je ne connais pas très bien son action, mais en tout cas elle
a du quitté son poste deux ans plus tard, dans un contexte de nombreuses
démissions d'employés de la WMF et de mauvaise ambiance de travail
manifestement. L'idée du recrutement longuement préparé n'a pas été une
réussite...
Parmi les motivations de Sue Gardner et de ceux qui l'ont laisser
développer cette politique, mon opinion est qu'il y avait notamment le
prestige les grandes entreprises du web voisines et l'envie de les
imiter : ce qui justifiait la forte croissance des employés et le besoin
de prendre la part du lion des ressources du mouvement (300 employés,
c'est toujours petit par rapport à Twitter ou Facebook...) et le
principe de piloter ses usagers partout dans le monde au gré de ses
politiques et de ses choix stratégiques.
Avant le fonctionnement poussé par Sue Gardner, et auquel on est
maintenant habitué, il y a eu un moment ou la règle suivie était que
les campagnes d'appel aux dons était orientés vers les chapters qui
étaient capables de les gérer (les appels aux dons étaient peut-être
conçus par eux), puis qu'ils reversaient typiquement 50 % de leurs
recettes à la WMF, dont le rôle était évidement central et particulier.
Cette sorte de subsidiarité me semblait tout-à-fait préférable et à
défendre plutôt que l'argent passe par San Fransisco tant pour les dons
que pour les usages, et même pas seulement pour le financement des
chapters, mais pour des actions et des groupes de diverses nature.
Néanmoins, malgré quelques tentatives de résistance, les chapters on du
s'y faire, la WMF ayant le pouvoir final sur les wikis donc sur l'argent
des appels aux dons.
Et donc pour en venir à Wikimédia France, du fait des liens
nécessairement forts avec la WMF, et de l'obligation de suivre et de se
plier en fin de compte à ses directives, je pense que l'association
française a développé une sorte de mimétisme de la WMF, et pas toujours
pour le meilleur. On peut penser que le principe d'une direction (ou
même une directrice) très autonome, celui du développement d'une équipe
salariale conséquente (toute proportions gardées) en toute autonomie des
demandes des membres ou wikimédiens actifs, et puis l'attitude un peu
paternaliste vis-à-vis des groupes locaux ("on peut se déplacer pour
discuter si vous avez des problèmes") sont arrivés notamment sous
l'influence du modèle de la WMF. Par ailleurs, l'équipe salariée de
Wikimédia France est amenée, ne serais-ce que pour elle-même à rendre
compte à la WMF (demandes de fond et bilans...) et donc mécaniquement à
moins rendre compte aux membres, voire à moins répondre à leur demandes,
ou bien avec des filtres forts et peut-être peu lisibles qui
retranscrivent les orientations de la WMF.
Sur le fonctionnement actuel du financement, et une critique
intéressante (c'est-à-dire que je la partage :-p) j'ai vu le dernier
message de Seb35 ici :
http://lists.wikimedia.fr/arc/discussions/2017-07/msg00016.html (j'ai
été désinscrit de la liste - bon je n'étais pas à jour de cotisation
depuis env 6 mois - mais j'ai accès aux archives avec mes codes d'adhérent)
Et puis il y a eu avant un message de Guillaume Goursat où il traite de
la demande de la WMF portant sur la diversification des sources de
revenus de Wikimédia France, et des difficultés que cela pose :
http://lists.wikimedia.fr/arc/discussions/2017-07/msg00011.html
Je serais plus radical. Quitte à parler de l'unité du mouvement
Wikimédia, il a globalement un accès très favorable aux donateurs par
les bandeaux sur le site extrêmement populaire qu'est Wikipédia.
En dehors de ça, il y a du monde sur le marché de l'appel aux dons, ne
serait-ce que dans le monde du libre, ou bien plus généralement. Faut-il
que les chapters s'y ajoutent alors qu'il y a tant de projets du libre
qui n'ont pas accès à un moyen aussi facile et ont du mal à couvrir leur
besoins ?
Sans compter qu'en collectant les dons en France, la WMF empêche aux
donateurs français d'avoir accès à la déduction fiscale, et puis une
gestion de proximité des donateurs (en tout cas l'argument a été dit à
l'époque)
Que la WMF se réserve les bandeau sur Wikipédia, et dise aux chapters de
chercher de l'argent ailleurs, me semble toucher à la mauvaise foi.
Plutôt que de déclarer qu'on enlèverait tout rôle consistant et poids
aux chapter, on les fait dépenser leur énergie pour survivre, la WMF
sécurisant pour elle la part des financement la plus sûre et la plus
facile à obtenir.
Donc en fin de compte les problèmes de Wikimédia France me semble liées
à une histoire plus large. J'espère qu'ils pourront être néanmoins en
bonne partie traités après une assemblée générale, je ne sais pas si
c'est certain mais je pense que c'est possible de bien redresser la
barre à cette occasion.
On a moins d'influence bien-sûr sur le contexte international du
mouvement, dont je regrette certaines évolutions passées (vous l'avez
compris !) mais bon qui n'est pas trop catastrophique non plus
actuellement !
À bientôt ! (quoique je parte en vacance là...)
--
Mathias Damour
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